L’ATMOSPHÈRE
L’atmosphère terrestre est issue du dégazage du magma du manteau, il y a 4.4 milliards d’années. La composition de l’atmosphère initiale de la Terre a été évaluée de deux façons :
- par comparaison avec la composition de certains réservoirs comme l’indique le tableau ci-dessous :
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ANALYSE COMPAREE DES GAZ CONTENUS DANS CERTAINS RESERVOIRS
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Gaz chondritique
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Gaz volcaniques terrestres
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Réservoirs des volatils terrestres
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Atmosphère de Mars
(t = -50 °C)
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Atmosphère de la Terre
(t = 15 °C)
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Eau en %
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80
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83
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87
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0.03
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< 1
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CO2 en %
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20
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12
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12
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95
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0.03
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Azote en %
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1
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5
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1
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5
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78
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Oxygène en %
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0
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0
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0.05
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0
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21
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La nature des gaz mantelliques est connue par l’étude des inclusions des minéraux précoces des basaltes des points chauds comme l’olivine.
Les isotopes de l’argon permettent d’identifier une hétérogénéité majeure qui paraît constituée de deux couches. Le manteau supérieur comme les dorsales est quasi complètement dégazé et contient peu de gaz rares. Le manteau inférieur comparable aux points chaudes recèle encore aujourd’hui ses gaz originels. Le rapport isotopique du manteau inférieur est proche de celui de l’atmosphère actuelle.
Le dégazage du manteau supérieur a donné naissance à l’atmosphère. Il a été précoce et violent. La composition de l’atmosphère initiale devait être très proche de celle issue du dégazage d’une chondrite ou des gaz mantelliques actuels. (sur Mars, il y a une faible gravité ( 0.4 g) et pas de tectonique des plaques. L’atmosphère primitive de Mars, de même origine, devait avoir la même composition à sa formation. Son évolution a été différente car l’eau est sous forme de glace à – 50 °C et le CO2 est sous forme gazeuse. La proportion CO2 / N2 de Mars est voisine de la proportion calcaire / N2 de la Terre.)
- par l’étude des cycles géochimiques. De nombreux constituants de l’atmosphère actuelle sont engagés dans des cycles : azote, carbone ,eau … avec des transformations continuelles entre phases liquide, solide et gazeuse. La connaissance des tonnages en roches calcaires et de la quantité d’eau contenue dans les océans et les glaciers permet de reconstituer la composition de l’atmosphère primitive si l’on suppose que tout le carbone était sous forme de CO2 et toute l’eau sous forme de vapeur.
Pour l’eau : 1380.1015 tonnes pour les océans et les glaciers
Pour le CO2 : 27.1015 tonnes de calcaires et dolomies + 7.1015 tonnes de matière organique fossile + carbone du CO2 et de la biomasse 47.1011 tonnes soient 34.1015 tonnes de carbone correspondant à 1240000.1011tonnes de CO2 + 417.1011 = 124.0417 1015 tonnes de CO2.
Pour l’azote : 5.1015 tonnes.
Pour l’oxygène : 1015 tonnes.
La masse totale de l’atmosphère était donc de 1509.1015 tonnes.
La surface de la Terre est de 4 (6.3.106)2 = 500.1012 m².
La pression totale aurait donc été de 1509 /500.103 = 3.103 tonnes par m² soit 300 atmosphères.
Les principaux constituants sont devenus liquides ( océans) ou solides ( glace, calcaires). En effet, la température a diminué : l’eau est devenue liquide et le CO2 s’est dissous sous forme de carbonates.
CO2 + 2H2O > HCO3- + H3O+
H2O + HCO3- > CO32- + H3O+
CO32- + Ca2+ > CaCO3
L’atmosphère primitive était donc riche en eau, dioxyde de carbone, (azote, méthane, ammoniac, hydrogène sulfuré et CO) mais dépourvue d’oxygène. La constante solaire de l’époque était de 1000 W / m² soit ¾ de sa valeur actuelle mais un fort effet de serre a permis de maintenir une température élevée en surface.
Les molécules pré- biotiques
Les molécules qui aujourd’hui sont fabriquées par des cellules ont dû exister avant l’apparition des premières cellules dont elles ont permis la réalisation. Il y aurait donc eu synthèse pré- biotique c’est-à-dire avant la vie cellulaire. Le problème biologique posé est donc : comment s’est réalisée la synthèse des premières molécules organiques sans l’intervention des cellules ? Deux hypothèses sont émises, nous rechercherons les arguments en faveur de l’une et de l’autre.
1) hypothèse 1 : formation dans l’océan à partir de l’atmosphère primitive.
Arguments expérimentaux
DOCUMENT 1: On introduit un gaz dans un ballon : ce gaz représente l’atmosphère primitive.
Premier mélange :
Il s’agit de conditions proches de l’expérience de Miller (page 276). On obtient des molécules organiques, acides aminés et bases azotées à partir de molécules minérales. Miller avait utilisé une atmosphère faite d’hydrogène, d’ammoniac, de méthane et d’eau qu’il a soumise à des décharges électriques pendant une semaine à température proche de 100°C. Il a obtenu des composés organiques : acide cyanhydrique (HCN), formaldéhyde ( HCHO), urée (CO(NH2)2) et quatre acides aminés, glycine, alanine, acide glutamique et acide aspartique.
Dans son expérience, la source de matière sont les atomes de C, H, O et N contenus dans l’atmosphère primitive et l’eau chaude de l’océan primitif. La source d’énergie sont les rayons UV ( pas de couche d’ozone à l’époque) et les décharges électriques (orages). Or, d’après le DOCUMENT 3, ce mélange ne correspond pas à la composition de l’atmosphère primitive telle que nous la définissons actuellement d’après la composition des gaz volcaniques terrestres.
Deuxième mélange :
L’atmosphère primitive a pour origine le dégazage du manteau terrestre, elle devait donc avoir une composition proche de celle des gaz volcaniques terrestres ou des gaz chondritiques ( document 3). Dans les mêmes conditions que dans la première expérience, il y a synthèse pré- biotique cependant aucun acide nucléique n’a pu être synthétisé. (sans ammoniac).
Des expériences plus récentes ont permis d’obtenir d’autres molécules et même des acides nucléiques. Des expériences actuelles sont réalisées au LISA ( laboratoire inter universitaire des systèmes atmosphériques du professeur Raulin) à partir des conditions atmosphériques du satellite Titan qui est par ailleurs riche en molécules organiques.
Remarque : (Faits d’observation) :
Les sources chaudes au fond des océans présentent actuellement des conditions proches de celles de l’océan primitif et ce sont des milieux très productifs riches en matière carbonée. Cette observation renforce l’idée que la vie aurait pu prendre naissance dans l’océan primitif.
2) hypothèse 2 : une origine extraterrestre.
Le DOCUMENT 2 indique qu’au moment de la formation de la Terre, le bombardement météoritique était très intense. La densité des cratères sur la Terre peut être évaluée d’après les résultats obtenus sur la Lune où l’absence d’atmosphère a empêché l’érosion.
La Terre a donc pu être ensemencée par des molécules organiques contenues dans des comètes, météores et météorites.
Le DOCUMENT 4 montre que les poussières de la comète de Halley comportent 33% de matière organique. Ces molécules ont pu être solubilisées dans l’océan primitif.
Les chondrites carbonées comme la météorite de MURCHINSON contiennent tous les acides aminés de la matière vivante et d’autres encore ( 74 / 20 dans la matière vivante actuelle). Elles contiennent aussi des bases azotées à l’origine des acides nucléiques.
D’autre part, l’analyse spectrale des nébuleuses ( nuage d’Orion) a permis de montrer qu’elles contiennent de nombreuses molécules carbonées : HCN, CH4, CH3CH2OH…
Les bases azotées et les acides aminés ne sont pas identifiés spectralement.
Dans ces deux derniers cas, les atomes de C, H, O et N proviennent de la nucléosynthèse secondaire dans les étoiles. La source d’énergie est l’énergie thermique.
Conclusion : les deux hypothèses sont étayées par des arguments. Le problème de la synthèse des molécules organiques avant la vie a été en partie résolu.
Les premiers indices de vie
1) Le métabolisme primitif
a) Le bombardement catastrophique de queue d’accrétion a pris fin vers –4 à – 3.9 Ga . Les premiers êtres vivants apparus vers – 3.8 milliards d’années étaient en majorité des cellules procaryotes avec une structure simple. Elles devaient tirer leur énergie de molécules pré- biotiques présentes dans l’océan primitif. Il s’agissait de cellules hétérotrophes ne pouvant présenter qu’un métabolisme anaérobie : glycolyse et fermentation. Le stock de molécules organiques consommées devait s’épuiser car les conditions nécessaires à leur synthèse avaient disparu. Avant –2.5 milliards d’années, la quantité de matière organique de la croûte continentale est restée faible.
La vie n’a pu se maintenir que parce que des formes autotrophes ont fait leur apparition très tôt dans les 200 Ma qui ont suivi. Les premières formes devaient réaliser une chimiosynthèse (bactéries chimio- litho-trophes) et fabriquaient de l’ ATP à par de l’oxydation de substrats minéraux :
La source de carbone pour les synthèses était le CO2 de l’air.
CO2 + 4H2 + énergie ( lumière ou chimique) > CH4 + 2H2O comme les bactéries méthanogènes actuelles.
b) Puis l’ ATP a pu être produit par photosynthèse , d’abord photosynthèse anaérobie par des bactéries photo- litho- trophes comme les bactéries sulfureuses vertes et pourpres actuelles qui possèdent de la bactériochlorophylle.
n CO2 + 2n H2S lumière > Cn H2O n + n H2O +2n S
Puis la photosynthèse aérobie fit son apparition. Divers arguments convergent pour affirmer que la vie est apparue de façon très précoce : des traces de matière carbonée dans les plus vieilles roches sédimentaires connues datant de 3.8 milliards d’années à Isua au Groenland ont un rapport carbone 13 / carbone 12 qui est celui de la matière organique d’origine biologique.
Des structures organiques sphériques nommées coccoïdes ou sphéroïdes ont pu être considérées comme les ancêtres des cellules avec lesquelles elles coexistent jusqu’à 1 milliard d’années environ.
2) La série sédimentaire de North Pole en Australie date de 3.5 milliards d’années. Les roches de la série ont presque échappé au métamorphisme et sont très peu déformées. On trouve :
- d’anciennes roches volcaniques, basaltes en coussins et formations rhyolitiques.
- Des couches sédimentaires correspondants à d’anciens dépôts détritiques (sables et argiles) et des évaporites. Ces dépôts ont été consolidés pour donner des cherts (roches sédimentaires siliceuses) alors que les évaporites à base de sulfate sont aujourd’hui représentées par la barytine. On peut reconnaître des stratifications horizontales et entrecroisées. Des lentilles de sable et de débris clastiques sont visibles. Des traces, qui pourraient avoir une origine biologique, sont observables dans certains de ces anciens sédiments. Ces objets de structure laminaire contenant de la matière carbonée sont interprétés comme des stromatolites provenant de l’activité de cyanobactéries ( procaryotes chlorophylliens) par comparaison avec des productions minérales semblables actuelles observées dans des marais salants du lac Assal.
Tout laisse à penser que l’on se trouvait dans une lagune côtière où se déposaient alternativement des sables et des argiles produits par l’érosion des volcans et où parfois se formaient des évaporites. Au fur et à mesure que la lagune s’ensablait, les courants et les vagues perdaient de leur force et ils ne pouvaient plus transporter que des matériaux de plus en plus fins.
Par ailleurs, une bonne partie des cristaux de sulfates – actuellement sulfate de baryum – de leur environnement sont sans doute à l’origine du gypse formé dans un milieu confiné. Ils pourraient avoir été le support d’autres organismes procaryotes autotrophes par chimiosynthèse
CO2 + HX + énergie ( lumière ou chimique) > matière carbonée.
Pour identifier les traces de matière carbonée, on fait appel au principe de l’actualisme. Les structures mamelonnées dont la microstructure rappelle celle des stromatolites actuels ont été assimilées à ces stromatolites.
On a également mis en évidence des microstructures carbonées, parfois associées par paires ou en chaînette ou en tétrades. Ces micro- sphères pourraient correspondre à des micro- fossiles. Enfin des bactéries filamenteuses auraient été découvertes. Toutefois, le doute subsiste, même pour les auteurs : les structures considérées comme des stromatolites pourraient ne pas être d’origine biologique. Les filaments carbonés pourraient être plus récents que 3.5 milliards d’années et avoir contaminé le gisement. Pour les micro- sphères, leur forme est si simple qu’il est difficile de savoir si elles proviennent d’êtres vivants.
Toutefois, la convergence des données plaide en faveur des êtres vivants.
Les stromatolites actuelles et fossiles sont semblables du moins quant à leur construction. Elles n’ont pas changé depuis 3.5 milliards d’années. En utilisant le principe d’actualisme, on peut affirmer que les lamines correspondent à des périodes d’activité de la colonie, c’est –à- dire à des périodes favorables à la photosynthèse . Les limites entre deux lamines correspondent à des périodes défavorables.
L’oxygène provient de l’activité de photosynthèse des cyanobactéries ( appelées algues bleu -vertes car elles s’associent en filaments ou cyanophycées) dont les plus anciennes datent de –3.5 milliards d’années.
CO2 + H2O > CHOH + O2
Cependant, les stromatolites ne se développent que vers –2.3 à –2.2 milliards d’années. A ce moment là la quantité d’oxygène libéré devient importante et les premiers oxydes ferriques s’accumulent.
La photosynthèse, absorbant le CO2 déplace vers la droite l’équilibre des carbonates :
2(HCO3-) + Ca2+ > CO2 + CaCO3 + H2O
L’étude du 13C renseigne sur la photosynthèse. Le rapport carbone 13 / carbone 12 est plus faibles dans les matières organiques que dans les calcaires. Le 13C est négatif dans les sédiments portant des traces d’activité photosynthétique. Le gisement d’Isua au Groenland à un 13C de –15 % ce qui indique une photosynthèse faible. Vers –3.5 milliards d’années, ce rapport atteint –25 % soit la valeur actuelle dans les sédiments : la photosynthèse étaient alors largement répandue.
Pendant deux milliards d’années, les cyanobactéries à l’origine des stromatolites ont dominé la biosphère, actuellement, elles sont plus discrètes. Dans les gisements anciens, la présence de la forme oxydée du soufre ( sulfate) et du carbone enrichi en carbone 12 de 20 à 30 % suggère l’existence d’une photosynthèse classique où l’eau est donneur d’électrons.
L’atmosphère et la vie
A. Les preuves de l’absence de dioxygène dans l’atmosphère primitive
1) les dépôts d’uraninite
En présence de dioxygène, l’uraninite ( minerai d’uranium) est très instable, il s’oxyde et devient alors très soluble et ne se dépose pas. La présence de dépôts d’uraninite révèle une teneur en dioxygène du milieu, au moment du dépôt, plus de 100 fois inférieure à la teneur actuelle. Or, les formations sédimentaires contenant de l’uraninite sont toutes plus âgées que - 2 Ga . Jusqu’à cette date , la teneur en dioxygène dans l’atmosphère était donc nulle ou très faible.
2) les gisements de fer rubané datant de –3 à –2 milliards d’années se sont déposés en milieu marin quand les ions ferreux ont précipité au contact de l’oxygène dissous. Ils prouvent que la majeure partie de l’oxygène produit par la photosynthèse a été consommé par l’oxydation des ions ferreux et n’a donc pas pu diffuser en milieu aérien.
Les oasis de vie qui existaient ici ou là dans des milieux calmes et confinés libéraient de l’oxygène qui était immédiatement piégé par des sulfures et du fer ferreux.
L’oxygène devait aussi permettre le fonctionnement de la chimiosynthèse :
2(SH2) + O2 -------------> 2(H2O) + 2S + énergie
3) l’absence de couches rouges continentales déposées dans les fleuves et contenant des oxydes ferriques. Elles se sont formées à partir de –1.8 milliards d’années. Cela indique qu’à cette date l’atmosphère terrestre jusqu’alors réductrice est devenue oxydante.
L’oxygène libre dans l’atmosphère est apparu à cette date.
B. Evolution du taux de dioxygène atmosphérique.
Le dioxygène libre se forme dès – 3.5 Ga grâce à l’activité des stromatolithes.
Il n’est apparu dans l’atmosphère que lorsqu’il a été produit en plus grande quantité par la photosynthèse qu’il n’a été consommé pour l’oxydation des matériaux géologiques.
Vers – 1Ga , le taux de dioxygène est de 1% du taux actuel. L’oxygène en excès devient un poison pour les êtres vivants : durant 1 milliards d’années, l’expansion de la vie est ralentie. Des êtres vivants au métabolisme différent se développent. A partir de –1.4 milliards d’années les cellules eucaryotes apparaissent , elles réalisent la respiration. La respiration libère 20 fois plus d’énergie que la fermentation.
Vers – 600 Ma il atteint 7 à 8 % du taux actuel. L’oxygène s’accumule dans l’atmosphère et permet la formation de la couche d’ozone protectrice des rayons UV vers – 500 Ma. Il atteint son taux actuel vers – 400 millions d’années
Les organismes animaux et végétaux se diversifient, augmentent leur biomasse et conquièrent le milieu aérien.
C. La diminution des taux atmosphériques de CO2 et H2O.
Le dioxyde de carbone dont le taux était très élevé dans l’atmosphère primitive a été piégé par les carbonates résultant de l’activité d’organismes photosynthétiques. La vapeur d’eau s’est condensée pour donner l’eau des océans.
